Gérard d\'Houville

Gérard d\'Houville

Voeu

Voeu

 

Je n'ai rien voulu des hommes

Oublieux et mensongers;

Sous les raisins et les pommes

Je dors au fond des vergers.

 

Satyres, gais petits faunes,

O vous qui veniez des bois

Dérober mes pêches jaunes,

Juteuses entre vos doigts,

 

C'est à votre folle bande

Que je lègue mon tombeau;

Vous y porterez l'offrande

Des grappes et du miel chaud;

 

Le citron par qui s'éclaire

L'arbre sombre où luit son or,

La grenade funéraire,

Seul fruit que je goûte encor.

 

Incarnates et coniques,

Les figues que l'été fend

Et les fraises impudiques

Qui pointent en rougissant,

 

Auprès des corbeilles blondes

Et des vases pleins de lait.

Dans le creux des coupes rondes

A quoi mon sein ressemblait.

 

Enfants du profond feuillage,

Près de vous que n'ai-je pu

Vivre la beauté de l'âge

D'un corps libre, heureux et nu!

 

De ma joueuse jeunesse

Songez aux chers jours passés...

J'étais peut-être faunesse

Par les longs yeux retroussés.

 

Les Poésis, 1931.

 



16/10/2012
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