Gérard d\'Houville

Gérard d\'Houville

Salomé

 

 

Salomé

 

Son corps svelte vêtu d'une soie à rosaces

Traîne l'obscur velours d'un ourlet empourpré

Sur le dallage blanc des plus hautes terrasses

Où l'arabesque luit dans le marbre nacré.

 

Au rebord du balcon où son rêve l'exile

Elle étend ses bras frais et joue avec ses doigts;

Son attitude semble une danse immobile,

La fleur de ses cheveux s'effeuille à ses pieds froids.

 

Sans doute courtisane et surtout enfantine;

Etre doux et pervers et toujours trop aimé;

Insensible sourire, orgueil de la narine,

Charme de ce qu'on sent perfide, Salomé.

 Sa taille ploie, et sous le long sourcil qui s'arque,

Son regard est cruel, innocent et lascif;

Est-ce d'avoir dansé devant le vieux tétrarque

Ou d'avoir soupesé le plat deux fois massif?

Elle regarde au loin. D'un argent mat et terne,

La lune, au ciel couvert, s'arrondit lentement.

Elle écoute. Le vent gronde dans la citerne

Ou quel râle lointain en monte sourdement?

Quel morne chef coupé, - souvenir ou présage, -

Flotte dans le halo de l'astre pluvieux?

Mais Salomé n'est pas détourné son visage,

Nul effroi ne la trouble et n'obscurcit ses yeux.

Qu'importe que la tête horrible roule, et saigne,

Et pèse un poids trop lourd à son geste ingénu,

Et que son pas dansant dans ce sang noir s'imprègne

Et qu'un Roi paternel convoite son corps nu?

Sa figure naïve est puérile et claire

Entre l'écartement lisse de ses bandeaux,

Et sa robe revêt la grâce singulière

D'un torse adolescent qui cambre un souple dos.

Elle s'attarde ainsi sur la terrasse blanche.

qu'est-ce que tout cela, petite fille? Rien.-

Et songe, en admirant son sein rond et sa hanche,

Qu'elle se trouve belle et qu'elle danse bien.

 



24/10/2013
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