Le sommeil
Le sommeil
Je connais le chemin qui mène à la demeure
Endormie, où l'Amour s'est encor reposé,
Où dans le beau jardin s'épanouit et pleure
Le doux jet d'eau d'argent, comme un long lis brisé.
Je n'allumerai pas la lampe psychéenne
Dont la flamme est funeste à l'amoureux destin,
Car la lune arrondit sa courbe à demi pleine
Et semble l'arc tendu par l'Archer enfantin.
Le croissant au dormeur lance ses lueurs vertes
Et guidera vers lui mes regards curieux,
Quand ayant réuni mes guirlandes ouvertes
Je viendrai les suspendre au seuil silenieux.
Je marcherai sans bruit, sans bruit le portail sombre
Roulera sourdement, sur le pavé du seuil
Qu'ensommeillent déjà de leur arôme d'ombre
Et d'oubli, mes pavots vermeils au coeur de deuil.
Mais le parfum montant des corolles magiques
Et mon sort, plus heureux que ton sort, ô Psyché!
D'un songe et d'un sommeil à jamais léthargiques,
Assoupiront mon corps auprès du sien couché.
Les Poésies, 1931